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Parcours à coeur ouvert d'un serial entrepreneur

Dernière mise à jour : 12 juin 2023

Sylvain Tillon - CEO de Tilkee



"Plus il y a de défis, plus ça me fait marrer, et plus on me dit quelque chose, plus j’ai envie de faire le contraire pour voir si ça marche." Sylvain Tillon

Aujourd’hui, je suis parti à la rencontre de Sylvain Tillon, le CEO et le co-fondateur de la solution Tilkee. Tilkee permet de traquer les documents numériques et de savoir si un document a été lu, par quelle personne et pendant combien de temps.


Dans cette interview, Sylvain nous parle de la notion d’échec, des obstacles qu’il a pu rencontrer lors de la création de ses plusieurs entreprises et des différentes solutions qu’il a mises en place pour s’en sortir.


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Alexis Eve : Bonjour Sylvain, je suis ravi de t’accueillir au sein de ce podcast Yaniro. Tu es le co-fondateur de Tilkee, une solution de tracking de document. Vous êtes un peu plus de 30 personnes sur le projet, vous avez fait deux levées de fonds, l’une à 500 000 et une autre à 3,5 millions. Tu fais également parler de toi par rapport à ton profil de « serial entrepreneur » et, notamment, car tu as créé différentes entreprises avant Tilkee. Tu as donc beaucoup de choses à dire sur différentes choses sur des sujets tels que l’échec, vivre, laisser mourir (Rires)


Sylvain Tillon : Surtout laisser mourir sa boîte ! J’essaye plutôt de garder le sourire et d’avancer en me disant que ce n’est qu’une phase. Pour l’avoir vécu, ce n’est vraiment pas quelque chose de drôle, mais, au final, je suis toujours là. Je pense que ça fait du bien d’en parler. À l’époque, j’ai peu entendu ce discours et, avec le recul, je me dis que ça m’aurait fait du bien de voir que je n’étais pas le seul à échouer. C’est une notion que les entrepreneurs ne partagent pas toujours, car ils abordent généralement une sorte de masque souriant et positif. Cependant, il y a des moments, dans une vie d’entrepreneur, où l’on est complètement perdu et où l’on ne sait plus où on va. De ce fait, on se sent un peu seul, mais il est important d’échanger sur le sujet afin que les entrepreneurs puissent se dire « il y en a d’autres qui vivent ça ! ».


Je viens de publier une petite interview sur l’échec et, potentiellement, sur comment se préparer à bien échouer. Même si cela peut sembler étrange, il existe des solutions. Par exemple, j’ai quelques amis entrepreneurs qui m’ont aidé à sortir la tête de l’eau. Il y a également deux associations qui sont très bien : 60 000 Rebonds, qui agit un peu partout en France, et Second Souffle, à Lyon. À noter qu’il y a également le Tribunal de Commerce. Il est possible d’aller les voir avant la cessation de paiements lorsque que l’on a envie de sauver son entreprise. Ils peuvent aider, notamment en gelant vos dettes pendant une année ou bien vous mettre en procédure de sauvegarde. Il y a de nombreux dispositifs juridiques qu’il est possible de mettre en place pour essayer de sauver son activité.


Cela me fait penser à un entrepreneur, Fibre Tigre, qui est un auteur de fiction, et qui dit qu’il y a beaucoup de choses dans la vie qu’il faut voir comme un « super-pouvoir ». Tout ce qui est partage d’expériences, notamment sur la fin de la vie d’une boîte, est quelque chose de bon à prendre.


Il faut quand même faire attention à ces « super-pouvoirs » car, dans ma première société, j’ai dû faire face à quatre procès. Deux de la part d’un concurrent qui m’a copié et qui m’a attaqué pour ne pas que je puisse le faire et une commerciale qui m’a volé des produits et qui ne voulait pas me les payer. À l’époque, j’ai trouvé que mes avocats n’étaient pas très bons, mais très chers. Le dernier procès était celui d’une banque, pour une affaire de caution que je ne pouvais pas payer. Comme j’avais acquis ces « supers-pouvoirs » avec les procès précédents, j’ai essayé d’y aller tout seul et de me représenter moi-même. J’ai remarqué que ce n’était pas si simple et que, par conséquent, j’ai engagé un nouvel avocat ! (Rires) Il faut donc vraiment être vigilant avec ce sentiment de savoir ce que l’on fait.


Nous avons un peu parlé avant l’interview de ton rapport à l’injustice. J’ai pu voir que tu avais partagé un article qui disait, en résumé, qu’avant de mettre en place des solutions pour pallier à certains problèmes, il faut d’abord regarder du côté des dirigeants. A ce sujet, j’aimerais te parler d’un un article que j’ai découvert il y a peu. Cet article défend le fait que « les névroses d’un dirigeant vont forcement contaminer l’organisation ». Du coup comment tes propres névroses influencent-elles Tilkee ?


Il y en a beaucoup (Rires) et j’ai même fait un travail indirect afin de les assumer et de pouvoir les annoncer en toute transparence aux candidats qui postulent chez nous ! Par exemple, j’ai une névrose qui est que j’ai un mode de management qui joue beaucoup sur la proximité, sur l’échange informel. Concrètement, j’ai vraiment besoin de voir les gens. Par conséquent, le télétravail est interdit dans mon entreprise, ce qui n’est pas du tout dans une dynamique de société moderne. Au quotidien, je veux partager avec tout le monde et pas seulement avec quelques personnes. Du coup, j’ai besoin que les collaborateurs soient dans les bureaux et j’ai le besoin de confronter toutes mes idées. On m’a d’ailleurs demandé de faire attention, car j’avais tendance à lancer mes idées comme ça, en attendant un rebond, et cela ne passe pas forcément auprès de tout le monde. Dans la liste de mes autres névroses, on retrouve un besoin de défis de façon permanente. Cela signifie que j’ai tendance à me mettre en danger régulièrement, au niveau du management ou du recrutement. J’aurais alors tendance à mettre les autres en danger avec moi…


Est-ce cela a déjà créé des difficultés avec les autres ?


Il y a certains collègues qui vont être en mesure de me le dire, et on va pouvoir rattraper ces difficultés. En plus de cela, on a mis noir sur blanc les névroses de la société, il n’y a pas seulement les miennes !


Ah oui ? Et quelles sont les névroses de Tilkee ?


Il va vraiment y avoir une névrose « bicéphale » dans le sens où je vais avoir une culture très libérée et mon associé aura plutôt tendance à avoir une culture très militaire. Il y a donc parfois des sujets où nos façons de penser se chevauchent, car on peut avoir une façon totalement opposée de fonctionner. Il nous arrive de nous contredire considérablement.


Comment vous faites dans ce genre de situation ?


Il y a un « tonton » qui a été choisi pour cela. Il s’agit d’une personne particulièrement sage qui sait nous parler, nous comprendre et trouver le juste-milieu entre les idées opposées que l’on vient de présenter.


Lorsque l’on t’écoute parler, on a l’impression que tout l’aspect « management » de ta société est quelque chose de vraiment important pour toi. D’où est-ce que ça te vient ?


Cela me vient d’une expérience un peu folle que j’ai vécue lorsque j’avais 18 ans. Je suis partie à Malte pour apprendre l’anglais. J’avais seulement un billet d’avion et j’ai dû trouver un travail pour vivre. Je me suis retrouvé cuisinier et, étant donné que Malte ne faisait pas encore partie de l’UE, je devais me « cacher », car je n’avais pas de visa de travail. J’ai appris beaucoup de choses incroyables, mais il y a également plusieurs autres choses qui m’ont gêné, voire choqué. Par exemple, nous étions payés en fonction de notre nationalité. Les mieux payés étaient les Maltais suivis des Italiens et des Français qui, selon les idées reçues, ont le plus de connaissances en termes de cuisine.


Ensuite, il y avait les autres nationalités européennes, comme par exemple les Serbes et les Roumains, qui pouvaient être moins bien payés malgré le fait qu’ils aient plus de compétences en cuisine. Pour finir, il y avait également les Libyens qui, eux, n’avaient tout simplement pas le droit de toucher la nourriture, ils étaient donc à la plonge. Cela a été vraiment choquant et je me suis rendu compte qu’il y avait vraiment une grande injustice.

Dans le même registre, il y a aussi eu la notion de pourboire. Je ne comprenais pas pourquoi seuls les serveurs pouvaient encaisser les pourboires alors que la nourriture que les clients mangeaient était celle que nous avions préparée. Je me suis alors dit que, le jour où j’aurais la possibilité de décider, je réfléchirais à une méthode plus juste. Pour moi, ça a été ça le point de départ. Après, il y en a eu un autre qui est que : plus il y a de défis, plus ça me fait marrer, et plus on me dit de faire d’une certaine façon, plus j’ai envie de faire le contraire pour voir si ça marche. Il y a plein de moments où je suis juste dans l’envie de faire différemment, car j’aime me faire mes propres idées des choses, expérimenter et que je n’aime pas suivre la méthode traditionnelle.


Chez Tilkee, vous avez une notion de transparence des salaires. Est-ce qu’il y a beaucoup de nouvelles idées de ce genre qui te passent par la tête ?


En ce qui concerne la transparence des salaires, on annonce les salaires des gens pendant l’entretien afin d’être totalement transparent. Pour 2019, j’ai un autre projet. L’idée sera d’envoyer mes collaborateurs une semaine par an en télétravail dans notre bureau londonien, qui sera ouvert en fin d’année, et une semaine dans notre bureau allemand, qui ouvrira au premier trimestre de l’année prochaine. L’idée est de pouvoir aider les personnes dans les bureaux étrangers à se sentir vraiment comme faisant partie intégrante de Tilkee.

Je veux également que mes collaborateurs de Lyon puissent apprendre de ces personnes qui ont peut-être une façon totalement différente de faire les choses. Cette envie vient également d’une expérience que l’on a raté lorsque mon associé est parti vivre six mois aux USA. Il y a vraiment eu un problème de compréhension. Concrètement, on n’arrivait pas à entendre ses différentes observations, car on ne vivait pas la même chose que lui. Quand je suis allé un mois là-bas, j’ai alors pu comprendre ce qu’il nous disait.


À l’inverse, dans tout ce que vous avez expérimenté, ton associé et toi, est-ce qu’il y a des choses que vous avez dû arrêter car ça ne fonctionnait pas ?


Par exemple, on m’a demandé d’un peu moins sur-communiquer sur des idées et de les faire passer à travers de filtres avant de les présenter à tout le monde. On a également arrêté de sur-vendre la boîte et on a mis en place un contre-entretien avec les différents candidats afin de mettre au clair toutes les raisons qui peuvent les pousser à ne pas venir dans la boîte. Cela permet d’être parfaitement clair avec le candidat et qu’il sache ce qu’il en est vraiment. Par exemple, je vais dire qu’il n’y a pas de possibilités de télétravail, que les salaires ne sont les meilleurs du marché, qu’il n’y a pas de bureau indépendant, qu’il n’y a pas de ticket restaurant, que l’on a une grosse culture du pré-travail et du post-travail et bien d’autres. À l’inverse, je préfère que le candidat soit également sincère sur ce qu’il est en mesure de faire ou non.


Est-ce qu’il n’y a pas un peu un « conflit intérieur » sur le côté personnel, car même si c’est important de se livrer entre collègues, tu dis aussi que tu as des règles bien établies pour séparer ta vie professionnelle et ta vie personnelle ?


Cela n’empêche pas que mes collègues connaissent ma vie personnelle, mais elle n’apparaît pas sur mes réseaux sociaux. Je ne vais pas afficher ma vie personnelle, car je pense que ce n’est pas vraiment intéressant. Après, chacun fait ce qu’il veut. Il y a certains collègues qui n’ont pas hésité à nous présenter leur conjoint alors que d’autres non. Concrètement, chacun est prêt à aider les autres quand ils ont un souci, mais on doit être en mesure de savoir repérer les signaux pour les épauler, d’où l’importance de se connaître un minimum.


Qu’est-ce qui te dérange dans le fait que l’on puisse te considérer sur seulement un aspect de toi-même ? Par exemple, il y a beaucoup d’entrepreneurs qui ne veulent pas juste être le stéréotype du « startupeur ».


Personnellement, ça me va bien d’avoir un personnage public et ça ne me dérange pas que l’on me voie que comme ça. Je me suis créé cette image du taré serial entrepreneur qui a créé Tilkee et qui se déguise en renard, et je ne veux pas qu’on aille me chercher sur autre chose.


Sur ma dernière interview, une journaliste m’a posé des questions originales comme par exemple sur mes prochains rêves. Je lui ai donc dit que j’aimerais bien racheter une entreprise dans la fabrication de poêles et de casseroles, car je suis fan de gastronomie et que l’utilisation de ces ustensiles est indispensable. J’adorerais vraiment travailler sur le marketing d’un produit comme ça. J’aimerais également travailler avec des équipes que je n’ai pas choisies, car ça ne m’est jamais vraiment arrivé. Concrètement, je n’ai pas de projet à court terme, mais il y a certaines choses que j’aimerais pouvoir faire un jour.


Il y a un sujet sur lequel j’aimerais bien t’entendre, c’est ton histoire en tant que serial entrepreneur. Comment est-ce que tu la raconterais par toi-même ?


Je n’ai pas du tout baigné dans le monde de l’entrepreneuriat depuis tout petit, mais j’ai toujours eu ce besoin de me différencier pour que mon père me remarque. J’ai donc toujours fait plein de choses depuis que je suis jeune. J’ai par exemple travaillé en tant que pizzaiolo, j’ai organisé la plus grande soirée étudiante de prépa à Paris, j’ai fait ce voyage à Malte et plein d’autres choses.


Lors de ma première année d’école de commerce, j’ai dû faire un projet virtuel d’entreprise et j’ai eu cette idée de bijoux pour cheveux. À la fin, j’ai été sélectionné parmi les douze meilleurs projets, j’ai fini onzième. Une femme est venue me voir en me disant que les bijoux étaient moches et que mon équipe ne tenait pas trop la route, mais que le concept valait le coup. Elle m’a donc donné sa carte pour que je puisse lui expliquer la suite de mon projet. À ce même moment, je devais également partir en stage à l’étranger comme tout étudiant de l’EM de première année et l’échappatoire était de créer sa société. Il y a eu l’enfer des premiers mois avec la création de la boîte (Lucyf’Hair, ndlr).


J’ai connu les premières galères au moment de devoir racheter les parts de mon associé. Je me suis confronté à l’avis négatif des gens qui pensaient que ça ne marcherait jamais. Les seuls qui voulaient bien produire mon concept étaient les Chinois et on a essayé avec eux. On a signé des beaux contrats, mais il y avait toujours des problèmes sur la production et la livraison. Toutefois, je n’ai pas arrêté d’y croire et il y avait une énergie folle derrière tout ça.

Je me suis associé avec une nouvelle personne de l’EM et avec un désigner vraiment talentueux. Il y a toujours eu la peur d’être en dessous de mes attentes et le fait d’être toujours dans le « système D ». On a vendu un peu vite et ça a créé la déception. Dans tous les cas, je reste incapable de créer seul, mais cela ne veut pas dire que je continue toujours avec mes associés, car, dans toutes mes boîtes, je me suis séparé de tous mes premiers associés.


Après Lucyf’Hair, tu as lancé Sydo ?


En parallèle de Lucyf’Hair, j’ai lancé Sydo. Avec un ami, on s’est retrouvé à faire de conférences et à donner des cours. On s’est alors rendu compte que, à la question « pourquoi vous n’entreprenez pas ? », la réponse était « parce qu’on nous a dit que c’était mieux d’être fonctionnaire ». Si tu as ce modèle de pensées depuis toujours, il y a quelque chose qui a raté, car, même si tu as les compétences et l’envie, tu ne t’autoriseras jamais à le faire. On a alors voulu expliquer que, mener ces projets, c’est aussi mener sa vie, et pas seulement en créant une société.


Mon ami a alors eu l’idée de créer une bande-dessinée à destination des collégiens. Je lui ai dit qu’il fallait vraiment aller au bout du projet et je lui ai proposé de le faire avec lui. Ça se fera donc en parallèle de Lucyf’Hair au courant de l’année 2007.


Même si 2008 a été une bonne année pour Lucyf’Hair, ça a commencé à devenir vraiment compliqué. Vers octobre 2008, au moment de la crise des subprimes, ça a commencé à être difficile car les gens ne voulaient plus rien acheter, les coiffeurs non plus ! De ce fait, le carnet de commandes de Lucyf’Hair a diminué de 60%. Le salon de la coiffure où l’on faisait normalement 30% de chiffre annuel a été annulé faute d’exposants. On se retrouve alors sans solution. Je décide à ce moment-là de créer ce qui va devenir Sydo.


Même si j’ai très mal vécu cette fin de Lucyf’Hair, j’avais déjà quelque chose en tête qui me permettait de ne pas sombrer et de toucher au moins 1 000€ par mois.


Quand ils ont compris que tu regardais ailleurs, comment ont réagi les autres collaborateurs de Lucyf’Hair?


Concrètement, je me suis auto-viré de la boîte au moment où l’on a dû faire face à un achat raté. En fait, leurs exigences étaient que l’on vire la personne qui faisait l’administratif et que je me vire moi-même. Pendant les 6 mois de la discussion, j’ai fait en sorte de ne plus avoir de rôle indispensable au sein de la société. J’ai donc tout organisé pour déléguer l’essentiel à mes collègues. Le jour de la signature, ils m’ont annoncé que la société ne sera pas rachetée entre 300 000 et 400 000 euros, mais 60 000. Sincèrement, j’en ai pleuré, notamment car je venais de rater une sortie honorable et car je n’avais plus de bureau dans ma propre société. J’étais alors obligé de revenir et de faire acte de présence, mais je n’avais plus de travail à proprement parler.


Cela n’a pas été vraiment dur pour les personnes de Lucyf’Hair car, n’étant plus payés, ils ont compris le fait que je veuille m’assurer un peu d’argent. Cependant, j’étais quand même là deux jours par semaine pour les aider. Concrètement, j’avais beaucoup plus à perdre que les personnes restant dans la boîte. En plus de ça, ils étaient très contents d’avoir ces nouvelles responsabilités et ils n’avaient pas vraiment envie que je les reprenne. Cette période de chevauchement m’a quand même permis de rebondir.


Toutefois, j’en ai profité pour chercher du travail, mais, grâce à Sydo, j’ai eu la liberté de refuser les missions que l’on me proposait et qui ne me convenaient pas. Au bout de quatre ans, Sydo a commencé à très bien tourner, on faisait près d’un million d’euros de chiffre d’affaires. Sincèrement, une boîte qui fait un million d’euros, qui paye ses gars, qui paye le dirigeant et où les gens sont fiers de ce qu’ils font, c’est déjà génial.


Par la suite, Tilkee a commencé lorsqu’un collègue m’a créé un espace web pour que je puisse envoyer des propositions commerciales complexes à mes clients. J’avais mis des trackeurs dedans par hasard. Un jour, j’ai consulté mon site et j’ai vu que mon client était sur ma proposition commerciale. Je l’ai donc appelé pour lui expliquer en détail ce qu’il ne comprenait pas. Je me suis alors rendu compte que j’avais vraiment besoin de savoir à quel moment le client était sur mon document afin que je puisse le guider et répondre à ses questions.


À ce moment-là, on a démarré un prototype de Tilkee. Même si les gens trouvaient l’idée bonne, il a quand même fallu la populariser. À la différence de Lucyf’Hair, l’erreur que je n’ai pas voulu reproduire était de me lancer dans Tilkee sans gagner d’argent. J’allais quitter une boîte dans laquelle j’étais payé et je ne voulais plus de ne pas être payé. Concrètement, la motivation chute lorsqu’il n’y a pas d’argent. La raison de mon échec de Lucyf’Hair est certainement que je n’avais pas cherché à gagner de l’argent.


Concrètement, pour un besoin de Sydo, tu as trouvé le concept de Tilkee ?


À ce moment-là, j’avais atteint un peu mon seuil d’incompétence chez Sydo. Je me sentais incapable de monter les prix, j’avais peur de décevoir mon client ou j’avais du mal à bien manager plus de dix personnes. Pour ces raisons-là, je pense que c’était un bon moment pour lâcher la barre. En plus, je voulais revivre ce défi du produit que j’avais raté en y ajoutant le côté web et le côté international qui me manquait chez Sydo. Je voulais vivre ce côté startup un peu folle et le côté investisseur. J’avais envie de revivre le truc et d’apprendre des gens, car, chez Sydo, j’avais l’impression de ne plus rien apprendre. J’avais le besoin que l’on m’impulse de nouvelles choses. Sydo fonctionne d’ailleurs mieux depuis que je ne suis plus là !


Qu’est-ce qui a poussé la boîte à se développer ?


Concrètement, ça a mis deux ans pour lancer Tilkee. On a lancé la boîte, mais on n’a pas fait beaucoup de chiffre : 3 000 € par mois la première année et 10 000 € pour la deuxième. Le produit a été beaucoup plus complexe que prévu à créer. Dès que l’on a voulu le systématiser et l’industrialiser ça a été beaucoup très compliqué. On s’est retrouvé dans un schéma beaucoup plus complexe. En plus de cela, on a fait des erreurs de production, on a voulu aller trop vite. On est allé aux États-Unis, ce qui a été à la fois une énorme erreur et une grande chance. En allant là-bas, et en présentant Tilkee, on s’est rendu compte que l’on a fait un produit français destiné aux Français et qu’il ne correspondait pas au système anglo-saxon. On a donc perdu une petite année à repartir de zéro et à créer un socle plus neutre, adaptable culturellement. Heureusement que l’on avait fait une bonne levée de fonds afin de tenir pendant trois ans.


Le prochain chapitre de ta vie avec Tilkee, tu le vois comment ?


Le prochain défi est l’ouverture du bureau à Londres et de placer une équipe là-bas. L’une de nos collègues de Lyon, qui est anglaise, va partir s’installer en Angleterre. Par conséquent, il y aura une personne qui connaît très bien la boîte et les produits qui sera sur place. Puis il va y avoir l’Allemagne avec qui on va rencontrer des premières boîtes pour commencer à discuter. Cela va être très sympa, car les Allemands ont une façon vraiment différente de travailler.


Aujourd’hui, j’ai besoin de ces projets, car j’ai moins un rôle opérationnel, il y a des gens meilleurs que moi à chacun des postes de l’entreprise. Je suis donc en charge de ces nouveaux défis. L’idée est également de mettre la société en vente dans les trois à cinq ans. Si elle n’est pas vendue, c’est que l’on n’aura pas atteint nos objectifs ou que l’on se sera planté quelque part !


À l’heure actuelle, de façon générale, qu'est ce qui est le plus important pour toi ?


C’est de me lever tous les matins avec le sourire. Si j’ai ça dans ma vie, c’est que j’ai un équilibre qui me convient et que j’arrive à m’éclater !


Où est-ce qu’on envoie les personnes qui veulent te parler ?


Je ne réponds pas au téléphone, mais je réponds aux messages sur LinkedIn ou bien sur Twitter !


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