Avec Maxime Legardez, co-fondateur de Maki
Après une dizaine d'années passées chez Rocket Internet, Maxime Legardez a créé en 2016, Everoad, une startup dédiée à l’optimisation du transport routier de marchandises, qu’il a revendu en 2020.
Il y a 6 mois, il redémarre une nouvelle aventure : Maki, spécialisée dans l’amélioration des processus de recrutement au sein des entreprises. Et pour cette nouvelle aventure, il a décidé de mettre en oeuvre bon nombre de principes innovants qu'il nous partage ici.
ÉCRIRE SON PROPRE MODELE PHILANTHROPIQUE, SES VALEURS ET SA CULTURE
Avant même de démarrer Maki, Maxime avait déjà réfléchi et décrit le type d'entreprise qu’il souhaitait monter. Comme le dit le patron de Salesforce, Marc Benioff, dans son livre, il est très important de commencer par écrire dans les statuts mêmes de l’entreprise son propre modèle philanthropique, ses valeurs et les grands aspects de la culture de l’entreprise, qui resteront le socle, les fondations de cette entreprise. C’est le why créé au début, qui restera bien sûr une base quand ça va bien, mais surtout quand ça va mal.
Pour Maxime, il est aussi important de monter une culture d'entreprise que l'entreprise elle-même, Cette culture repose sur 3 grands piliers :
PREMIER PILIER :
un processus de décentralisation de la prise de décision
"Dans la culture Maki, on veut donner le pouvoir aux gens de l’équipe, c’est très important, on veut que les gens se sentent responsables, adultes et qu'ils puissent décider. Une entreprise, c'est un collectif d'intelligence, et X cerveaux valent toujours mieux qu’un seul cerveau - même le plus intelligent du monde. En conséquence, chez Maki, 100 % de l’entreprise est au capital, dès le début, on veut que les gens puissent prendre des décisions, avec le poids de la responsabilité et du destin d'entreprise sur leurs épaules. Comme le dit Steve Jobs, on ne recrute pas des gens intelligents pour leur dire quoi faire, on recrute des gens intelligents pour qu'ils disent quoi faire. Et ça c'est quelque chose qui est appliqué chez Maki, tout est écrit dans le processus de décision.
Par exemple, si quelqu’un veut prendre une décision, il va pouvoir porter cette décision, donner du contexte, donner sa proposition, aller chercher les feedbacks dans les autres cerveaux de l'équipe pour s’en nourrir et prendre sa décision d'une manière éclairée. Netflix appelle ça le capitaine éclairé.
Trois outils concrets notamment vont dans ce sens de donner de l'autonomie, de la responsabilisation et du pouvoir aux gens de l’équipe :
100 % des gens ont des BSPCE (bons de souscription de parts de créateur d'entreprise)
Chacun peut prendre une décision en utilisant un outil bien connu des développeurs : GitLab. Par ex quelqu’un souhaite changer le pricing de Maki. Il va ouvrir une issue sur GitLab, il va dire tout le contexte autour de ce sujet là, il va proposer quelque chose issu de ses recherches, de son étude des best practices ailleurs, il va expliquer pourquoi on devrait dans cette direction, il va demander aux gens autour de lui de compléter cette réflexion, le pour et le contre. L’avantage de ce processus est qu’il est asynchrone, tout le monde va pouvoir donner son avis (contrairement à une salle de réunion où c'est toujours celui qui parle en premier, qui parle plus fort ou qui a plus haut grade qui va être écouté en premier et donc biaiser la discussion). Nourri par toutes ces informations, ces feedbacks, ces inputs, la personne pourra prendre la meilleure décision possible, de façon autonome et responsable.
Tous les mardis les gens se fixent leur target pour la semaine à venir. On a quatre grands objectifs dans Maki, déclinés en 10 key results, avec 160 initiatives, chacun ayant ses propres initiatives pour le trimestre, qui sont revus à chaque quarter. Tous les mardis, sur un slack channel ouvert au public, chacun peut dire ce qu’il a fait la semaine dernière, là où il a des difficultés ou besoin d’aide, ainsi que ses propres objectifs les sept prochains jours. Outre la transparence donnée par ce processus, il responsabilise beaucoup les gens, cela leur donne le pouvoir de dire qu’ils contribuent un peu à la réussite de l’entreprise, et qu’on leur fait confiance.
Ce genre d'organisation horizontale très libérée et responsabilisante ne se trouve décuplée en termes de réussite et d'efficacité qu’à partir du moment où elle est soutenue par des process, des outils et des règles qui sont clairs et partagés par des gens qui savent utiliser ces outils. Sinon chacun donne son avis, c’est la foire et rien n’avance. D’où l’intérêt de la culture de l'écrit asynchrone, qui est adapté aux entreprises remote : tout le monde a le même niveau de connaissance, personne n’est écarté et chacun peut ainsi contribuer à la prise de décision et faire avancer les process.
DEUXIÈME PILIER :
Au-delà du but de l’entreprise, la notion du "for good"
Ce deuxième pilier est actuellement en train d’être mis en place. Le marché de Maki est celui du marché de l'emploi, du monde du travail de l'humain.
Mais peut-on faire un peu plus qu'un logiciel RH ? Maxime a puisé de nouveau son inspiration dans Salesforce, où dans les statuts de l'entreprise, Marc Benioff avait créé le modèle qu'il appelle Pledge 1%.
Chez Maki, il propose les 3 engagements suivants :
Que toutes les entreprises à but non lucratif, les ONG etc, qui ont des besoins de recrutement, ou des besoins de se structurer en interne puissent utiliser l'outil Maki, totalement gratuitement.
Collaborer avec Vendredi, une entreprise sociale qui va permettre à toutes les personnes de Maki de consacrer une demi-journée à une journée par quarter, pour aider une association de leur choix, liée au monde de l’emploi donc aux thématiques de diversité, d'égalité homme-femme, d’égalité des chances, de reconversion professionnelle, etc.
Dédier une partie de notre chiffre d'affaires pour aider financièrement les associations que Maki juge utiles pour le monde.
Et ce n’est pas parce qu’on ambitionne de faire de Maki une entreprise à 10 milliards au niveau mondial, qu’on n’a pas envie de faire des choses utiles pour le monde d’aujourd’hui, de créer de l'inspiration pour les entreprises de demain, et imprégner au final des milliers ou millions de collaborateurs de cette touche : faire quelque chose for good.
TROISIÈME PILIER :
apporter de la valeur à l’humain et faire évoluer les gens
On pourrait subdiviser ce pilier en 3 parties :
1 - La partie recrutement :
Déjà, tout simplement, une entreprise, ce sont ses peoples. Et les peoples du début restent les plus importants, parce que ce socle de 10 / 20 / 30 / 40 ou 50 premières personnes, ce seront eux la face de l'entreprise demain, qui vont recruter les 10 000 ou 500 000 autres personnes.
Donc si jamais on recrute au début des A players, ils vont recruter ensuite des A players parce que les A players vont vouloir revendre une entreprise de A players. En revanche si jamais on a des B players au début, ils vont recruter des C players.... Google a théorisé cela sous le nom de lack bandwagon : il faut toujours recruter des gens meilleurs que soi, sinon la courbe finit par descendre à terme. Le recrutement et en particulier le recrutement du début est donc extrêmement important.
Maki met donc un point d'attention hors du commun à rechercher des gens non seulement responsables et autonomes, mais qui vont avoir une ambition démesurée et sans limite par rapport à tout qui doit être fait et qui seront capables demain d'attirer les meilleurs talents mondiaux.
Et quel est le meilleur truc que l’on peut apporter à un employé ? Une prime, des BSPCE, mettre des baby-foots partout… ? Non, c’est de faire en sorte qu'il ait des collègues qui le tirent vers le haut et qui le fascinent un peu. Si dès le matin tu as autour de toi des collègues avec lesquels tu te sens chanceux de travailler avec, en comme des potes et en plus tu te marres avec eux, en fait tu ne voudras plus partir de cet environnement là.
Et pour s’assurer d'être dans une entreprise où des personnes très talentueuses se tirent les unes les autres vers le haut, le point crucial est de recruter par rapport aux valeurs de l’entreprise, à la culture d’entreprise, à ses process et ses points d’attention.
2- La partie communication :
La communication dans l’entreprise doit être limpide, c'est-à-dire que les gens doivent pouvoir extrêmement facilement trouver l'information. En particulier dans une boîte qui scale vite, où tu ramènes plusieurs personnes par semaine, on ne peut pas répéter à toutes les nouvelles têtes la même chose tous les lundis. La documentation doit donc être extrêmement bien rédigée et accessible à tout le monde. Chaque personne qui arrive doit pouvoir trouver dans le livre de l’entreprise tout ce qu’il faut pour se sentir à l'aise.
Donc toute cette partie onboarding / communication / transparence de l'information est une ressource clé.
Chez Maki, les process discussions se font sur Gitlab, et tout ce qui est storage / connaissance c’est sur Ocean. Par exemple, tous les mois une page Ocean est envoyée aux investisseurs, et toute l’entreprise y a accès. De même, tous les Zoom du mercredi en synchrone sont enregistrés, et ils sont tous accessibles sur Ocean.
Pour que tout cela fonctionne, surtout en scaling, Maxime n’a pas forcément de recette miracle, surtout que Maki est en début d’aventure… Mais voici quelques tips qui peuvent aider :
Être soi-même exemple. Faire bien déjà soi-même ce que l’on a à faire
Si quelqu'un ne fait pas bien, ne pas lui dire qu’il le fait bien
Dans son dernier livre What You Do Is Who You Are, Ben Horowitz nous dit que si jamais on accepte quelque chose qui ne respecte pas certains points de la culture de l’entreprise, qui sont off culture, sans s’en rendre compte on créé une new culture, qui n’est plus celle de l’entreprise.
Quand on recrute quelqu’un, se demander si on serait ok d’en avoir 10 identiques, car dans quelques semaines c'est ça qui va probablement se passer… et dans cet ordre d’idée, quand tu laisses passer quelque chose qui n’est pas très grave, est-ce toujours si insignifiant si ça se passe 10 fois dans les semaines qui viennent ?
Un dernier exemple venant de chez Netflix, en tant que manager, se poser la question : si toute mon équipe démissionnait demain pour aller chez le concurrent, avec quels collaborateurs je passerais une nuit blanche pour essayer de les convaincre de rester ?
3- La partie people dev
La question qui se pose est la suivante : comment faire pour qu’au fur et à mesure de leur carrière, les employés puissent grandir, continuer à apprendre ? Car les gens sont recrutés pour certaines compétences, mais si on veut les garder sur du long terme, ils doivent continuer d'apprendre, et cela se fait grâce au terreau créé autour d'eux :
par des collègues brillants
par tout ce qui est mis en place pour qu'ils puissent constamment avoir la possibilité de s'exprimer, d’apprendre, et innover.
Toute cette partie est un chantier en cours chez Maki, qui est une entreprise encore jeune. Un process est justement en cours d’écriture et de formalisation, nommé Séquoia (le nom d'un arbre qui grandit très haut), qui a pour objectif de faire grandir les gens. Maxime pourra revenir nous en parler d’ici quelques temps.
Pour conclure, s’il y avait un dernier conseil pour guider dans ses premiers pas un entrepreneur, un responsable RH en start up qui écouterait ce podcast, ce serait lequel ?
Pour Maxime, ce n’est finalement pas une quête personnelle car des centaines de personnes ont déjà passé toutes ces épreuves entrepreneuriales auparavant, avec les mêmes soucis, les mêmes problématiques. Alors il faut s’ouvrir et rencontrer de nombreux entrepreneurs. Maxime fait partie par exemple d'un groupe qui s'appelle le Galion, qui permet d'échanger avec plus de 350 entrepreneurs. Et quand on a un souci, c’est aussi en s’ouvrant, en étant vulnérable qu’on va apprendre beaucoup de choses qui vont nous servir ensuite. Il y a aussi de nombreux livres à lire tous les jours, et aussi des podcasts qui sont une mine d’informations.
Vous pouvez retrouver Maxime sur Linkedin,
et le site de Maki à cette adresse : https://www.makipeople.com/
Les ressources recommandées par Maxime :
“What You Do is Who You Are : how to create your Business Culture” de Ben Horowitz
Nombreux livres sur la culture de Netflix, ou de Salesforce
Le standard Maki expliqué par Maxime Legardez
Dans une période post-COVID, Maxime a voulu répondre aux nouveaux défis qui se sont posées aux grands groupes du jour au lendemain et qui devraient selon lui continuer de marquer le champs d'évolution des RH dans les 10 prochaines années au sein des entreprises
la façon dont on échange,
la façon dont on recrute,
la façon dont on garde les gens au sein de son entreprise,
la façon dont on leur donne du feedback, dont on les onboarde ou les offboarde, comment on leur fait apprendre de nouvelles compétences, de nouveaux métiers, etc.
Mi-année 2021, Maxime décide de passer un mois à rencontrer 100 DRH, que ce soit au sein de petites boîtes, de grosses start-up, ou d’entreprises du CAC40. Il est allé leur demander : quelles sont vos problématiques aujourd'hui, et comment vous voyez vos challenges dans 10 ans ?
À la suite de ces entretiens, deux aspects sont ressortis :
1) 80% des discussions tournaient encore autour du recrutement, avec des feedbacks assez classiques, par ex : “le recrutement talent c'est capital pour nous mais ça prend du temps, on doit gérer beaucoup de candidatures”, “nos managers ne sont pas forcément formés en recrutement”, “on n'a peut-être pas les bons outils”, “on ne sait pas si on recrute vraiment sur les compétences ou au feeling”, “les erreurs de recrutement nous coûtent cher”, etc…
Mais en filigrane apparaissaient aussi de nouvelles thématiques déjà abondamment traitées dans notre podcast RH :
le remote a changé les modes de recrutement
le recrutement des millennials, via une stratégie mobile
l'importance de la marque employeur dans un marché de l'emploi tendu
Les thématiques de diversité et d'inclusion travailler dans une entreprise où il n’y a aucune ouverture sur le monde ?
2) Sur 100 entreprises il y a 100 process de recrutement différents. Pourquoi n’existe-t’il pas de best practices dans le process de recrutement, à l’image du CRM qui permet de gérer la relation client dans toutes les entreprises désormais ?
De là est née l’idée de créer un standard de recrutement pour que dans quelques années, les entreprises utilisent Maki pour recruter, comme elles utilisent Salesforce pour leur CRM...
Maki repose sur deux principes fondateurs :
Maki se veut un outil POUR les candidats. C’est assez nouveau, jusqu’à présent la plupart des entreprises RH du monde entier étaient faites pour les recruteurs, pour les managers. Mais le monde change, et chez Maki on pense qu'aujourd'hui, il appartient aux candidats : ce sont eux que l’on doit séduire, retenir, comprendre et aider au quotidien.
Deuxième point important chez Maki, c'est que l’on est convaincu que le monde de demain doit se baser sur les compétences des candidats, et non plus sur l’école inscrite sur le CV. Si cela pouvait marcher dans le passé, aujourd’hui cela n’a plus de sens, et cela en aura encore moins dans le futur où nos enfants devront constamment apprendre / désapprendre des compétences, des métiers. La vision à terme c'est de devenir un peu ce skills wallet, ce passeport compétences qui permettra aux gens du monde entier d'avoir un passeport compétences qui les suit et où Maki deviendra comme une certification de toutes les compétences tout au long de la carrière du candidat.
Par exemple on pourra dire d’un candidat : à ce jour, c’est quelqu’un d’empathique dans sa personnalité ; en terme analytique il est extrêmement bon ; il est fluent en anglais avec tel score ; il sait coder en python et en go ; il a des bases de mandarin et en plus il a énormément de drive dans la façon dont il aborde les pratiques commerciales… etc.
Et grâce à ce process, on résout finalement une grande partie des problématiques du marché de l'emploi :
parce qu’on résout la friction qu’il y a pour les gens de trouver le job de leurs rêves tout au long de leur carrière, ce qui est très important,
et on résout le gros problème des entreprises de pouvoir recruter d'une manière beaucoup plus simple, efficiente, objective et au final d'avoir en leur sein des équipes qui vont être complémentaires, diversifiées, et épanouies au quotidien.
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